Une autre énergie est possible

Pour les foyers français équipés de chauffage électrique (environ 1 sur 3) qui ont carburé à plein régime durant la vague de froid, la facture risque d’être douloureuse. Autre nouvelle peu réjouissante, M. Pierre Gadonneix, PDG d’EDF, a évoqué le 8 janvier une hausse possible des tarifs de l’électricité dans les prochains mois. Dans ce contexte,  l’éolienne de Philippe Starck annoncée finalement pour juin, pourrait être non seulement l’objet fashion de l’année 2009,  mais un équipement providentiel pour diminuer les prochaines factures. 






 

L’éolienne, un modèle Darrieus à axe vertical, sera produite à raison d’environ 15 000 unités cette année, à St Nizier sous Charlieu dans la Loire, sur le site industriel de Pramac France qui fabrique déjà des groupes électrogènes (Pramac est un groupe italien qui a 20 filiales dans le monde et a réalisé 230 M d’€ de CA en 2007).  A la Biennale du Design de Saint-Etienne en novembre dernier, l’éolienne a obtenu le prix du design entreprise.

2 gammes sont prévues à partir du modèle de base :

1) Une gamme avec des modèles tripales, d’une puissance respective de 1 kW, 3 kW et 5 kW, sur des mâts de 1,5 à 3,8 m, pour les jardins.

2) Une gamme avec des modèles bipales (comme celui de la photo), d’une puissance de 150 à 400 W, sur des mâts de 50 à 90 cm, destinés à équiper des toits et des terrasses. Celles-ci devraient être à un prix inférieur à 500 €.

D’après Pramac, l’éolienne permettra de couvrir entre 10 et 60% de la consommation électrique d’un foyer, selon son modèle. La mise sur le marché est prévue pour cet été mais la commercialisation n’est pas encore complètement définie. Donnera-t-elle droit à un crédit d’impôt pour équipement écologique ? Ne rêvons pas trop quand même…

Tous les modèles sont reliés à un accumulateur et destinés à l’autoconsommation d’électricité, ne permettant pas la revente d’électricité à EDF ou à un prestataire.

Mais pourquoi faut-il donc que l’éolienne soit « invisible » ? Cet objectif, qui a des raisons esthétiques, a compliqué un peu la mise au point, avoue Stéphane Berthat, Directeur Général de Pramac France, et les ingénieurs se sont beaucoup triturés les méninges pour que le choix du matériau (du polycarbonate transparent) et l’option technique (axe vertical) ne limitent pas trop les performances de l’éolienne.

    Si ça marche, le coup de génie clouera peut-être le bec aux vieux barbons toujours prêts à attaquer les éoliennes au nom de la défense des paysages. Et, comme l’année 2009 a bien failli démarrer dans l’obscurité,  le produit a déjà un atout marketing choc:  « Contre le black-out, installez votre éolienne invisible »… 

Et si les éoliennes nous sauvaient du black-out qui menace ?

Selon un communiqué du Syndicat des Energies Renouvelables, « Au moment où nous vivons une pointe historique de consommation électrique, supérieure à 91 000 MW, le parc éolien français contribue à l’approvisionnement électrique de notre pays avec une production proche de 1000 MW. Les éoliennes nous permettent déjà d’économiser l‘usage de 2 centrales thermiques et se substituent à cette production, la plus émettrice de CO2. De plus, le coût de l’électricité éolienne est inférieur à celui des centrales thermiques permettant un gain net pour la collectivité. Avec un parc de 25 000 MW installés en 2020, tel que le prévoit le Grenelle de l’Environnement, près de 10% de la production électrique sera d’origine éolienne, soit l’équivalent de la totalité de la production thermique (charbon et gaz) actuelle.

Grâce aux 3 régimes de vent décorrélés dont bénéficie l’hexagone, la production éolienne française est plus stable que dans tous les autres pays européens : La production éolienne du 6 janvier dernier a été d’environ 800 MW et celle du lendemain a légèrement augmenté pour atteindre les 1000 MW en soirée, au moment du pic de consommation. En outre, la production éolienne est, durant cette période de froid, supérieure à sa moyenne annuelle illustrant, encore une fois, la forte contribution de l’éolien en période hivernale, comme l’a révélé le Réseau de Transport de l’Electricité (RTE) dans son bilan prévisionnel ».

Source : Syndicat des Energies Renouvelables

A l’Institut Montaigne, le 12 novembre, M. Giscard d’Estaing, est reparti en guerre contre les éoliennes. « Coûteuses, inutiles » selon lui, elles auraient aussi le tort de ne pas être honorées dans l’art et la littérature. M. Giscard d’Estaing a oublié ses classiques. Il devrait relire « Le secret de maître Cornille », une fable des Lettres de mon moulin d’Alphonse Daudet, dont voici quelques extraits :

«Notre pays, mon bon Monsieur, n'a pas toujours été un endroit mort et sans renom, comme il est aujourd'hui. Autre temps, il s'y faisait un grand commerce de meunerie, et, dix lieues à la ronde, les gens des mas nous apportaient leur blé à moudre... Tout autour du village, les collines étaient couvertes de moulins à vent. De droite et de gauche on ne voyait que des ailes qui viraient au mistral par-dessus les pins, des ribambelles de petits ânes chargés de sacs, montant et dévalant le long des chemins; et toute la semaine c'était plaisir d'entendre sur la hauteur le bruit des fouets, le craquement de la toile et le Dia hue ! des aides-meuniers... Le dimanche nous allions aux moulins, par bandes. Là-haut, les meuniers payaient le muscat. Les meunières étaient belles comme des reines, avec leurs fichus de dentelles et leurs croix d'or. Moi, j'apportais mon fifre, et jusqu'à la noire nuit on dansait des farandoles. Ces moulins-là, voyez-vous, faisaient la joie et la richesse de notre pays.
Malheureusement, des Français de Paris eurent l'idée d'établir une minoterie à vapeur, sur la route de Tarascon. Tout beau, tout nouveau ! Les gens prirent l'habitude d'envoyer leurs blés aux minotiers, et les pauvres moulins à vent restèrent sans ouvrage. Pendant quelque temps ils essayèrent de lutter, mais la vapeur fut la plus forte, et l'un après l'autre, pécaïre ! Ils furent tous obligés de fermer... On ne vit plus venir les petits ânes... Les belles meunières vendirent leurs croix d'or... Plus de muscat ! plus de farandole !... Le mistral avait beau souffler, les ailes restaient immobiles (...)
Maître Cornille était un vieux meunier, vivant depuis soixante ans dans la farine et enragé pour son état. L'installation des minoteries l'avait rendu comme fou. Pendant huit jours, on le vit courir par le village, ameutant le monde autour de lui et criant de toutes ses forces qu'on voulait empoisonner la Provence avec la farine des minotiers. "N'allez pas là-bas, disait-il ; ces brigands-là, pour faire le pain, se servent de la vapeur, qui est une invention du diable, tandis que moi je travaille avec le mistral et la tramontane, qui sont la respiration du bon Dieu..." Et il trouvait comme cela une foule de belles paroles à la louange des moulins à vent, mais personne ne les écoutait (...) ».

Pour profiter de toute la fable :

http://fr.wikisource.org/wiki/Les_Lettres_de_mon_moulin_-_Le_Secret_de_ma%C3%AEtre_Cornille

De nombreux peintres ont représenté les moulins à vent. Pour en citer quelques uns : Camille Corot et son tableau « Moulins à vent Jumeaux sur la butte de Picardie » (visible au département des Peintures du Musée du Louvre), Van Gogh qui a peint les moulins de Montmartre et notamment 3 superbes toiles illustrant « Le Moulin de la Galette », Claude Monet et son « Moulin à vent à Zaandam». A l’instar des moulins à vent, gageons que les éoliennes inspireront bientôt les artistes contemporains. Le designer Philippe Starck en personne n’a-t-il pas prévu de lancer son éolienne ? (annoncée initialement pour l’automne 2008, sa sortie est repoussée à 2009, tout le monde retient son souffle…)

Si le débat de l’Institut Montaigne est, finalement, assez ennuyeux (http://www.institutmontaigne.org/desideespourdemain/index.php/2008/11/13/226-valery-giscard-d-estaing-anne-lauvergeon-corinne-lepage-et-les-eoliennes#co) , les réactions qu’il suscite sont parfois éclairantes. Dans la liste des commentaires, un internaute fustigeant « le ton » et « la suffisance » de l’ancien Président de la République, déclare que « du coup, il nous donne envie de planter une éolienne dans notre jardin, même en ville». Bigre. Et si on tenait là une explication au nouvel engouement pour l’éolienne domestique ? Le responsable ? Giscard d’Estaing ! Avec sa nouvelle croisade, il a déchaîné les passions.

                                               Ne voyez-vous pas au loin,

                                               Dans les courettes et les jardins,

                                               Pointer ces mâts et ces pales,

                                               Erigés par tous ces braves gens ?

Lors des journées européennes de l’énergie éolienne le 13 juin dernier, Poweo (CA 2007 de 363,1 Millions d’€, 173 employés) a organisé une visite de la centrale éolienne de Louville-la-Chenard en Eure-et-Loir, où l’énergéticien exploite 12 éoliennes (sur un total de 18). D’une puissance de 24 MW, le parc représente un investissement de  33,6 Millions d'€ pour Poweo. Ceux qui n’ont pas pu venir peuvent découvrir la centrale sur son site web, tout nouveau, plein d’infos et de photos :

www.eoliennes-de-louville.info

Il est intéressant d’apprendre que sur une année de production, la centrale éolienne de Louville permet d’éviter :

- soit 46000 tonnes de CO2 (par rapport à une production via des centrales thermiques)

-  soit 4700 tonnes de CO2, 500 kg de déchets radioactifs à vie courte et 50 kg de déchets radioactifs à vie longue (par rapport à une production issue d’un mix « thermique / nucléaire / hydraulique »).

Alors, bon vent à ces éoliennes !

Avec une puissance installée de 359 MW et 328 MW en cours de mise en service, l’Eure-et-Loir est le département qui compte le plus grand nombre d’éoliennes en France. Favorablement exposée aux vents, la région Centre (Cher, Eure-et-Loire, Indre, Indre-et-Loir, Loir-et-Cher, Loiret), fait partie des territoires leader dans la production d’énergies renouvelables avec une puissance de 607 MW fournies par 207 éoliennes.

Un compte-rendu de la visite de la centrale de Louville :

http://www.thewindpower.net/55-journee-eolien-2008-louville-poweo.php

Alors que certains Don Quichotte ne redoutent pas les combats d’arrière-garde  (aux dernières nouvelles, Valéry Giscard d’Estaing a rejoint la croisade de Vent du Bocage contre le « lobby germano-danois à l’assaut de la campagne française »), des investisseurs malins préfèrent capter les vents favorables qui soufflent ici et ailleurs.   

Theolia (producteur européen d’énergies renouvelables, Aix en Provence) a doublé son chiffre d’affaires au 1^er trimestre 2008. Avec un montant de 41,2 millions d’€, celui-ci a fait un bond de 112%  par rapport au 1^er trimestre 2007. Sur la même période, les ventes d’électricité d’origine éolienne ont triplé et atteint 38,4 millions d’euros.

Selon le communiqué "cette croissance s’explique par l’augmentation de la puissance éolienne installée pour compte propre, qui est passée de 64 MW début 2007 à 333 MW début 2008, ainsi que par l’augmentation de la puissance installée pour compte de tiers, qui est passée de 145 MW début 2007 à 297 MW début 2008".

Les marchés phares de l’éolien de Theolia sont actuellement l’Allemagne et la France. L’entreprise annonce un "pipeline de projets en développement de 2 728 MW » répartis entre l’Europe de l’Ouest (France, Allemagne, Italie, Grèce, Espagne) et les pays émergents (Maroc, Inde, Amérique latine et Europe de l’Est). 

But : Parvenir à « une puissance installée d’au moins 2 000 MW d’ici fin 2011 ». Pour 2008, Theolia confirme son objectif de chiffre d’affaires consolidé compris entre 370 et 400 millions d’euros.

Communiqué complet :

http://www.newsinvest.fr/data/communique/18690807482b3faea0a34.pdf

La micro-éolienne : Un peu d’air pour le pouvoir d’achat des ménages ?

Le designer Philippe Starck a lancé une éolienne domestique lors d’un salon récent à Milan (cf http://www.colorwatt.com/article-19165445.html ).

Nous avons obtenu quelques précisions :

C’est un modèle Darrieus à axe verticale. Sa production d’électricité démarre à partir d’une puissance de vent de 2,5 m/s.

Pramac, l’entreprise italienne qui industrialise l’éolienne, prévoit de décliner 2 gammes à partir du concept de base :

1) Une gamme professionnelle (pour les entreprises, hôtels, etc…) avec des modèles tripales, d’une puissance respective de 1 kW, 3 kW et 5 kW.

2) Une gamme grand public avec des modèles bipales (comme celui de la photo), d’une puissance de 150 à 400 W. Bien que cela semble assez faible, une telle éolienne permettrait de couvrir entre 10 et 60% de la consommation électrique d’un foyer. Elle sera en principe commercialisée en septembre entre 300 et 400 €. En tant qu’équipement écologique, elle devrait ouvrir droit à un crédit d’impôt ce qui la rendrait vraiment accessible à « M. Tout le Monde » comme le souhaite Philippe Starck. ! Mais aucune confirmation pour l’instant. A suivre donc…