A l’occasion d’une conférence de presse aujourd'hui, Jean-Louis Bal, Président du Syndicat des Energies Renouvelables, a présenté l’état d’avancement français en matière de chaleur et d’électricité renouvelables, et a constaté qu’à ce rythme, il manquera 7 Mtep (Millions de Tonnes Equivalents Pétrole), soit 35 % du but, pour atteindre l’objectif prévu pour 2020. Pour rappel, l’objectif de 23% d’ENR a été défini dans le cadre du Paquet Energie Climat européen et repris par le Grenelle de l’Environnement. Afin de redresser la barre, le SER a fait 6 principales propositions : porter l’objectif du photovoltaïque à 15000 MW en 2020, doubler le Fonds chaleur, libérer l’éolien de son carcan administratif, préparer dès maintenant le 2ème appel d’offres éolien maritime, construire une politique de l’offre dans toutes les filières renouvelables, et mettre davantage de moyens en matière de performance énergétique et de promotion des ENR dans le bâtiment.
Plus de détails :
Chaleur renouvelable : Des efforts à poursuivre
Dans le collectif (industriel et tertiaire), Jean-Louis Bal a rappelé les résultats du Fonds chaleur qui a permis de financer des projets pour 8000 tep/an dans le solaire thermique et 16000 tep/an dans la géothermie (sur 2 ans). Dans la biomasse, les projets financés en 2009 et 2010 représentent une production annuelle de 500000 tep. Le secteur a profité d’une relance des investissements et des recrutements ont eu lieu sur toute la chaîne de valeur. Pour remplir l’objectif du Grenelle en 2020, les professionnels de la chaleur renouvelable demandent de doubler la dotation du Fonds chaleur afin de pouvoir financer deux fois plus de projets et porter à + 8,6 Mtep la progression 2010-2020, au lieu de +4,2 Mtep suivant le rythme actuel.
Dans l’habitat individuel : Concernant le chauffage au bois, le SER rappelle que la pérennisation du crédit d’impôt est essentielle pour atteindre les objectifs du Grenelle (9 millions de foyers équipés en chauffage au bois en 2020 contre 6 millions actuellement) et pour soutenir la modernisation indispensable du parc français au regard des enjeux d’amélioration de la qualité de l’air. A propos du solaire thermique et des pompes à chaleur, le SER constate une tendance négative et met en garde contre une baisse du crédit d’impôt qui pourrait déstabiliser le secteur.
Electricité renouvelable : Un essor stoppé par des dispositions législatives défavorables
La loi NOME a prévu que les coûts de raccordement des installations de production d’électricité à partir de sources d’énergies renouvelables seront intégralement à la charge du porteur de projet, ce qui renchérit le coût des projets. La Loi de Finances pour 2011 multiplie par 2 l’imposition liée à l’évolution de la taxe professionnelle qui passe de 2913 €/MW à 7000 €/MW sans pour autant apporter davantage de recettes aux communes qui accueillent un parc éolien ou photovoltaïque.
Solaire photovoltaïque : l’élan de la filière française cassé
Les objectifs en termes de parc pour 2020 devraient être atteints mais les décisions récentes risquent d’obérer la création d’une filière industrielle française. Avec de fortes baisses de coût ces dernières années, le solaire photovoltaïque pourrait atteindre la parité réseau dans le Sud de la France d’ici 2015. La filière qui représentait 25000 emplois chez nous va hélas subir le contrecoup négatif des restrictions imposées par les pouvoirs publics. Pour éviter ce gachis, le SER et sa branche photovoltaïque SOLER veulent lever la contrainte de 500 MW par an et revoir la dégressivité trimestrielle des tarifs d’achat. Même pour le particulier, un projet d’installation PV est devenu très compliqué car on ne sait pas quel tarif sera appliqué dans 3 mois. Comment cela se passe ? Quand un trimestre arrive à échéance, ERDF a 15 jours pour communiquer ses informations à la CRE. La CRE calcule le nouveau tarif puis le transmet au Ministère de l’Energie. Résultat : il peut y avoir un bon laps de temps (un mois) pendant lequel le tarif n’est pas connu !
Le SER demande de porter l’objectif du parc photovoltaïque en 2020 jusqu’à 15000 MW (avec un impact sur la facture d’électricité du consommateur maintenu à un niveau de 5% d’ici 2020).
Le SER a annoncé qu’un label France sera bientôt disponible pour les modules PV.
L’éolien étouffé par un carcan administratif
En dépit d’une réglementation complexe, l’éolien se développe dans notre pays au rythme de 1000 MW par an. Selon les projections tendancielles du SER, il devrait toutefois manquer 7000 MW d’éolien (soit environ 2200 éoliennes) pour atteindre l’objectif de 25000 MW en 2020. Le SER et sa branche France Energie Eolienne souhaitent une révision et une simplification des procédures, la suppression de l’obligation de 5 mâts minimum qui élimine 10% des projets dans l’Hexagone et jusqu’à un projet sur deux en Bretagne, Basse Normandie ou dans les Pays de Loire, et la suppression de l’ICPE.
Interrogé au sujet des projets éoliens citoyens, Jean-Louis Bal a précisé que la structure Energie Partagée devait recevoir une réponse imminente des autorités boursières pour pouvoir lancer des appels publics à l’épargne.
Concernant l’éolien offshore, Jean-Louis Bal a expliqué que les zones délimitées ne permettent pas de faire les 3000 MW et que le principe d’un « prix plafond éliminatoire » risque de tirer les prix par le bas. Avec de telles conditions, il n’y aura pas d’éolien offshore en 2015.
Pour les principaux autres secteurs :
Pour l’hydroélectricité, le SER demande « que les futurs classements de cours d’eau soient élaborés en cohérence avec les Schémas régionaux Climat Air Energie qui situeront le potentiel hydroélectrique, et qu’ils ne gèlent pas 90 % du potentiel hydroélectrique comme les projets le laissent augurer aujourd’hui ; sans compter les nouvelles procédures Natura 2000, très impactantes, à la fois sur l’existant et sur les projets de développement.
Sur le plan économique enfin, les professionnels demandent que les conditions soient réunies pour que les producteurs de petite hydroélectricité, dont les contrats d’obligation d’achat arrivent à leur terme en 2012, trouvent sur le marché une valorisation suffisante de leur production renouvelable : visibilité de long terme, reconnaissance de la valeur verte, agrégation de la production, permettant une optimisation de leur outil de production ».
Pour l’électricité issue de la biomasse, «le SER considère que les appels d’offre ne sont pas le mécanisme de soutien approprié. FBE, branche biomasse du SER, étudie un nouveau mécanisme de soutien pour la biomasse électrique qui permettrait de développer la filière à hauteur des objectifs du Grenelle. Enfin, une revalorisation du tarif de l’électricité issue de la méthanisation est attendue en mai 2011. Le SER souhaite que cette revalorisation permette de soutenir le décollage de la méthanisation en France, notre pays disposant d’un abondant gisement de matières premières et de déchets susceptible d’alimenter une filière énergétique importante ».
Pour les énergies marines, « les acteurs des énergies marines rappellent qu’il est crucial que ces projets, comme l’ensemble des projets industriels, puissent disposer dans les prochains mois, de sites d’essais, pour tester les technologies, à proximité des côtes françaises et d’un accès facilité, au moyen d’une réglementation simplifiée ».
A propos du biogaz, la mise en place d’un tarif pour l’injection du biogaz dans le réseau de gaz naturel est attendue au 1er semestre 2011. Elle constituera une première en France.
Concernant les biocarburants, l’objectif pour la 1ère génération est pratiquement atteint. Le défi pour la 2ème génération reste à relever mais plusieurs pilotes de production sont en cours de développement.
Les ENR représentent près de 100000 emplois en France actuellement
Fin 2010, les énergies renouvelables employaient 94000 personnes en France dont 11000 dans l’éolien. Sur les 11000 salariés du secteur éolien, 5000 travaillent dans l’industrie a précisé Jean-Louis Bal, dénonçant l’idée reçue (et propagée par les détracteurs de l’éolien) à propos de l’absence d’industrie éolienne en France. La balance commerciale du secteur est équilibrée, la France exportant des composants d’éoliennes vers des fabricants étrangers à hauteur d’environ 1 milliard d’€ par an. 60000 emplois sont possibles dans l’éolien français en 2020. Pour favoriser les rencontres entre les entreprises et les candidats à un emploi dans le domaine, le prochain colloque éolien du SER, à Dijon les 18 et 19 octobre, accueillera le 19 un forum des métiers avec des possibilités d’informations et d’échanges.
Un Livre Blanc pour aider les candidats aux élections 2012 à une prise de décisions
Le SER a annoncé la publication à l’automne 2011 d’un Livre Blanc qui présentera les préconisations des professionnels pour atteindre et même dépasser les objectifs 2020 d'ENR, dans le cadre d'une vision énergétique 2030 compatible avec le facteur 4 (c’est-à-dire la feuille de route prévoyant une division par 4 des émissions de GES en 2050 afin de contenir le réchauffement climatique à une hausse de 2°C).